Comme il y a des climatosceptiques, y’a-t-il des ‘inégalito-sceptiques’, des “marchands de doute” décidés à user d’arguments fallacieux pour nier la hausse des inégalités de revenu dans les pays développés ? Dans cet article, Arnaud et moi (Louis) vous parlons de la “guerre des économistes” au sujet d’un des enjeux les plus brûlants du XXIème siècle.
Si vous lisez la presse économique ou même généraliste, vous avez peut-être entendu parler de ce que The Economist appelle « la guerre des économistes ». Le débat fait rage entre deux groupes de spécialistes sur une question qui paraît pourtant simple : les inégalités de revenus aux États-Unis ont-elles réellement explosé depuis les années 1980 ?
Un trio d'économistes soutient que les inégalités de revenus ont fortement augmenté ces dernières décennies, en particulier aux Etats-Unis. Il s’agit de Thomas Piketty, Emmanuel Saez et Gabriel Zucman (PSZ). Ils jouissent d’un prestige indiscutable au sein de la profession. Les trois sont lauréats du Prix du Meilleur Jeune Économiste de France, et Emmanuel Saez et Gabriel Zucman ont même reçu la médaille John Bates Clark, l'une des distinctions les plus prestigieuses en économie.
En contraste, Gerald Auten et David Splinter (AS), docteurs en économie et spécialistes de la statistique nationale américaine, proposent une analyse très différente. Ils occupent des postes clés au sein des institutions fédérales américaines : David Splinter est économiste au congrès américain, et Gerald Auten au Département du Trésor, l’équivalent du ministère de l’économie en France. Un de leurs articles, publié dans le Journal of Political Economy -une des revues à comité de lecture les plus influentes en économie- présente une vision bien différente. Selon eux, l'augmentation des inégalités aux Etats-Unis serait beaucoup plus modérée que ne le suggèrent les travaux de PSZ. La controverse est souvent résumée par ce type de graphique, avec les résultats de PSZ en bleus, et ceux de AS en rouge :
La réponse de PSZ a été très sèche. Ils ont accusé AS de faire montre d’”inequality denial” - voir par exemple ici pour lire les trois auteurs employer ce terme. On pourrait traduire cette expression par inégalo-scepticisme, en écho au climato-scepticisme (“climate change denial”). Le débat est donc virulent, et il dépasse la simple querelle académique ; il a de vraies implications politiques. Si le niveau acceptable d’inégalités est une question éthique qui dépend en dernier ressort des préférences de chacun, il est toujours plus facile de justifier une hausse de la fiscalité sur les plus riches si les inégalités ont crû de manière incontrôlée. Ainsi, Piketty, Saez et Zucman ont utilisé leurs recherches pour promouvoir une hausse de la fiscalité sur les plus riches. Il est difficile d'ignorer les engagements politiques de Piketty : il a été récemment été qualifié par Le Figaro de « pape de la gauche radicale », ce qui est sans doute parfaitement excessif mais illustre bien son ancrage dans la pensée militante à gauche. Beaucoup de lecteurs savent peut-être déjà que Saez et Zucman sont également engagés politiquement à gauche. Ils ont signé l'appel de la NUPES lors des législatives françaises de 2022 et ont joué un rôle clé dans la campagne présidentielle de la démocrate Elizabeth Warren en 2020 aux États-Unis.
À droite, l'American Enterprise Institute, un think tank conservateur américain, a repris les critiques de Splinter et Auten pour soutenir que les inégalités de revenu n'ont pas augmenté au point de justifier des changements fiscaux. Dans le même style, écrivant dans Le Point, Antoine Copra argue que ““[l]es conclusions de l’étude d’A-S] remettent en cause bien des croyances économiques du XXIème siècle [Rien que ça !] (...) Pour Piketty et Saez, la hausse des inégalités est imputable à la série de réductions d'impôts commencée par l'administration Reagan. Une vision remise en cause par cette nouvelle étude et, avec elle, une grande part de la littérature économique qui en a découlé. Au point de nous interroger sur la pertinence de nombre de politiques fiscales du XXIème siècle.”. En bref : à gauche comme à droite, on se soucie de savoir si les inégalités ont bien augmenté.
Alors, qui a raison ? La question ne semble pas particulièrement complexe et technique. Ne suffit-il pas de mesurer directement les inégalités de revenu et de vérifier si elles ont augmenté ? Tout le monde a vu les courbes croissantes d’inégalités construites par Piketty, Saez et Zucman. Ne faudrait-il pas être “un marchand de doute” comme l’écrivait le journaliste d’Alternatives Economiques Christian Chavagneux pour nier tendance si nette ?
En réalité, pour estimer les inégalités de revenu, il faut poser un certain nombre d’hypothèses. Tout le débat est de savoir quelles hypothèses sont les plus raisonnables. De manière générale, on ne mesure jamais rien directement. C'est ce qu'on appelle en philosophie des sciences le problème de Duhem-Quine.
Dans cet article, avec Arnaud, nous allons passer en revue et expliquer les hypothèses principales qui sous-tendent ce débat. Cela peut peut-être vous aider à identifier celles qui vous semblent les plus valables et à forger votre propre opinion - si vous n’êtes pas déjà un expert du sujet !
Bien sûr, pour que des résultats empiriques soient corrects, il faut que les données utilisées en entrée soient correctes, et que le traitement (code) qu’on y applique le soit aussi. En effet, pour traiter les vastes données de l’Etat américain sur les revenus de ses contribuables, il faut écrire du code. Or, PSZ a souligné récemment une erreur de code dans AS qui expliquerait une bonne partie de l’écart (en attendant la prochaine réponse !).
Toutefois, au-delà de ces hypothèses “techniques”, des hypothèses liées à la théorie économique sont cruciales. Trois questions importantes se posent quand on souhaite savoir si les riches sont de plus en plus riches (en tout cas si les inégalités de revenu ont augmenté) : comment tenir compte de la fraude ? Comment savoir qui paie réellement les taxes (oui, c’est une question plus complexe qu’il n’y paraît) ? Au fond, qu’est-ce qu’un revenu ?
Question 1 : Comment tenir compte de la fraude ?
Tout d’abord, on n’observe évidemment pas tous les revenus, sans quoi les différentes formes de fraude ne seraient pas un sujet. Alors, quelle hypothèse faire sur la répartition des revenus qui échappent aux autorités ?
On pourrait penser que chaque contribuable cache (ou oublie de bonne foi, qui sait) une même proportion de son revenu. Si c’est le cas, le revenu caché est proportionnel au revenu observé. Auten et Splinter s’appuient eux sur des audits menés par le fisc américain, l’IRS, explorés dans une étude précédente (Auten and Langetieg (2020)). Un avantage est que cette méthode trouve des revenus non-déclarés chez des agents avec un revenu déclaré négatif (des entreprises faisant officiellement des pertes). Ce serait impossible suivant l’hypothèse de PSZ : on ne peut pas frauder une somme d’argent négative !
Toutefois, un inconvénient de la méthode des audits d’Auten et Splinter est que l’on peut manquer de granularité : la méthodologie ne compte qu’une dizaine de groupes. Plus encore, les conclusions de l’étude d’audit d’AS ne sont pas partagées par d’autres études empiriques. Par exemple, une équipe d’économistes qui inclut Zucman défend que de telles méthodes d’audit ne détectent pas bien la fraude des plus riches, qui passe souvent par des mécanismes plus complexes. Annette Alstadsæter, Niels Johannesen et Gabriel Zucman montrent dans un article dans l’American Economic Review (une très prestigieuse revue à comité de lecture) de 2019 une très grande concentration de la fraude chez les plus riches. Vous l’aurez peut-être deviné au nom des auteurs, cette étude est menée sur des données scandinaves, parmi les meilleures au monde !
A noter d’ailleurs que cette répartition n’a pas de raison d’être immuable. On pourrait penser, par exemple, qu’au milieu du XXème siècle, la fraude était facile, et courante chez des ménages et entreprises au revenu officiel faible, puis qu’avec les avancées de l’administration, la fraude s’est professionnalisée et est à présent concentrée chez les plus riches. Si tel est le cas, aucun audit à une date précise ne pourrait éclairer à lui seul l’histoire du revenu fraudé. L’hypothèse associée au revenu non-déclaré (unreported income) est l’une des plus commentées et des plus significatives pour expliquer l’écart entre les deux équipes.
Question 2 : Qui paie vraiment les impôts ? (l’incidence fiscale)
On peut s’intéresser aux inégalités avant les taxes ou après les taxes. Après tout, si les évolutions de l’économie américaine ont mené à une hausse des inégalités (hausses des très hautes rémunérations, crises dans certains secteurs) mais que celles-ci sont compensées par un système de redistribution, ces inégalités pourraient sembler moins préoccupantes. A l’inverse, si le système est devenu moins redistributif, les politiques publiques pourraient avoir encore creusé les inégalités !
Suffit-il de regarder les chèques faits au Trésor public (sur les salaires, sur la consommation, sur les dividendes…) et les allocations reçues, pour savoir qui bénéficie de la redistribution et si le système est devenu plus ou moins progressif ? Traditionnellement, on considère en économie qu’il faut tenir compte de ce qu’on appelle l’incidence fiscale. Par exemple, sachant que je perçois des Aides Personnalisées au Logement (APL), mon propriétaire peut augmenter le loyer. Ainsi, ce transfert bénéficie à mon propriétaire, qui n’a pourtant rien touché directement de l’Etat. Il ne s’agit pas d’un raisonnement purement théorique. On trouve dans les données des preuves de ce phénomène. Pour reprendre l’exemple des APL, un article célèbre de Gabrielle Fack (2006) montre qu'un euro supplémentaire d’APL ne baisse le loyer net des locataires que de 22 centimes, car celles-ci entraînent une augmentation de 78 centimes du loyer.
De même, des études montrent que l’impôt sur les sociétés (naïvement, un problème pour les actionnaires / détenteurs de capital) est partiellement répercuté sur les salaires des employés. Fuest et al. (2018) montrent que des hausses d’impôt sur les sociétés ont réduit les salaires en Allemagne. Symétriquement, Kennedy et al. (2022) montrent qu’une baisse de l’impôt sur les sociétés aux Etats-Unis a augmenté l’emploi et les salaires (des 10% plus riches !). On doit donc faire des hypothèses supplémentaires pour savoir qui paye vraiment les impôts, et elles sont cruciales pour savoir si la politique fiscale réduit ou augmente les inégalités. (1)
Entre les deux équipes, le principal désaccord sur l’incidence fiscale porte sur la corporate tax (impôt sur les sociétés). Les recettes de cet impôt sont considérables et ses taux ont fortement baissé dans la plupart des pays occidentaux au XXème siècle. Si on le “fait payer” surtout aux actionnaires, en moyenne riches, on a là une source importante d’augmentation des inégalités. Si on pense que cette baisse de l’impôt sur les sociétés a bénéficié aux salariés (voire aux consommateurs), leur permettant d’avoir de meilleurs salaires qu’auparavant (respectivement, des prix plus bas), ce constat est bien moins prononcé. Bien entendu, il n’y a pas de bonne réponse à la question de savoir quelle convention doit être adoptée. On peut être convaincu par le papier précité sur des données allemandes, mais penser que la situation est très différente aux Etats-Unis. On peut même avoir une estimation précédente sur les Etats-Unis, mais penser que la situation a beaucoup changé depuis.
Vous l’aurez deviné, PSZ fait plus peser la taxe sur les actionnaires que AS. Dans un working paper (un article pas encore publié) récent, Saez et Zucman (2023) défendent même l’attribution complète de cette taxe aux actionnaires - avec des arguments théoriques intéressants mais qui débordent largement du cadre de ce billet. En tout cas, en adoptant cette dernière convention (comme dans leur ouvrage The Triumph of Injustice), les auteurs estiment une hausse des inégalités encore plus forte.
Question 3 : Qu’est-ce qu’un revenu ?
A bien y réfléchir, la définition même de ce qu’est un revenu est-elle évidente ? (2) Mon salaire net, qui arrive sur mon compte en banque, est certainement un revenu qui m’appartient. Mais ai-je aussi des revenus qui n’apparaissent pas sur mon compte en banque ? Les cotisations “patronales” (payées en théorie par l’employeur) sont-elles un revenu en moins pour mon employeur, ou de l’argent que j’aurais touché si ces taxes n’existaient pas ? (3) Peut-on dire pour autant que ces taxes me font perdre un revenu que je n’ai jamais touché ? Pour savoir si je me suis enrichi entre deux dates, la quantité intéressante est-elle mon salaire net, mon salaire brut, encore autre chose ?
Plus complexe : les bénéfices d’une entreprise sont certainement du revenu pour les actionnaires au moment où ils sont convertis en dividendes. Même raisonnement si un actionnaire vend ses parts et que l’argent arrive sur un compte en banque. A l’inverse, imaginons que ces bénéfices soient plutôt réinvestis dans les activités de l’entreprise. Sont-ils déjà un revenu pour l’actionnaire, alors qu’il peut les perdre sans jamais les avoir touchés physiquement ? Ou alors, ces bénéfices ne deviendront-ils du revenu que lors de la vente d’actions ou du versement d’un dividende ? Mais si on opte pour cette deuxième hypothèse, à qui appartiennent ces revenus dans l’intervalle ? Parmi les évolutions importantes de l’économie américaine, une réforme fiscale de 1986 a fait baisser le taux d’impôt sur le revenu des plus riches, les incitant à sortir de l’argent de leurs entreprises et à le déclarer comme revenu propre. S’il est indéniable que les revenus sur les fiches d’impôt des plus riches ont alors augmenté, Auten et Splinter considèrent qu’une bonne partie était déjà du revenu leur appartenant.
Des divergences de ce type sont aussi importantes sur les revenus de l’épargne retraite, qui sont devenus plus importants notamment pour la classe moyenne, en particulier dans les pays sans système de retraite par répartition à la française.
Autre sujet : les “loyers imputés” (4). Les personnes qui possèdent leur logement n’ont pas de loyer à payer, ce qui peut être considéré comme une forme de revenu. Mais déterminer la valeur de ce loyer théorique est compliqué et les deux équipes d’économistes (PSZ et AS) ne procèdent pas de la même manière : l’une s’appuie sur la valeur globale du patrimoine immobilier, l’autre sur les données de la taxe foncière.
A propos des revenus du capital, faut-il compter les plus-values comme des revenus ? Une plus-value est la hausse de la valeur d’un actif, comme une action ou un logement. Savoir si de telles hausses constituent bien un flux de revenu n'est pas évident. Par exemple, si les prix des maisons dans votre quartier augmentent, votre patrimoine augmente, vous êtes plus riche sur le papier, mais cela n’augmente pas vraiment votre revenu disponible, votre pouvoir d’achat, sauf si vous prévoyez de vendre pour déménager ailleurs où les prix n’augmentent pas autant. John H Cochrane, professeur de Finance à l’Université de Chicago et de Stanford a écrit un billet sur ce sujet sur son blog de l’économiste grincheux - voir aussi ce thread sur X de Sylvain Catherine, Professeur de Finance à Wharton, ou pour les plus motivés, cet article académique. Il ne s’agit en tout cas pas d’un point anecdotique : depuis 40 ans, les taux baissent, avec à la clef de substantielles plus-values.
Enfin, en dehors des transferts (comme les allocations sociales par exemple), comment considérer le rôle des dépenses publiques générales ? Par exemple, l’argent collecté par l’impôt sert à financer la sécurité, les routes, ou l’éducation. Qui en bénéficie le plus ? Les plus riches bénéficient-ils plus des services de sécurité parce qu’ils auraient plus à perdre aux cambriolages ? Ont-ils plus profité du système éducatif pour en arriver là où ils sont ? On peut choisir d’attribuer le “bénéfice” de la dépense publique de façon égale à tous les citoyens. On peut aussi considérer que ce bénéfice doit être évalué en fonction des revenus de chacun. C’est un choix méthodologique qui peut changer le diagnostic sur les inégalités.
Perspective inverse, le déficit public est un revenu négatif de l’Etat, or on cherche à attribuer tous les revenus à des individus, du 1% de plus riches au 1% de plus pauvres. Vaut-il mieux retirer ce déficit du revenu des plus riches (qui pourraient un jour payer plus d’impôts pour le rembourser) ou de celui des plus pauvres (qui, de même, pourraient un jour toucher moins de prestations) ?
On observe jamais rien directement
Cette controverse illustre un concept important en philosophie des sciences : le problème de Duhem-Quine. Celui-ci naît de ce qu’en sciences, les faits ne sont jamais totalement "purs" ou indépendants des hypothèses qui les sous-tendent leur observation. Autrement dit, chaque mesure dépend nécessairement de ce qu’on appelle des hypothèses auxiliaires. Si je souhaite vérifier que l’eau bout à 100 degrés Celsius dans des conditions normales de température et de pression, il me faut supposer que le thermomètre que j’utilise fonctionne correctement. L’hypothèse que ce thermomètre donne une lecture fiable est ici l’hypothèse auxiliaire.
Dans le débat entre PSZ et AS, le choix des hypothèses auxiliaires est justement la source des divergences majeures. Selon les hypothèses retenues, les inégalités de revenus aux États-Unis peuvent apparaître comme ayant fortement augmenté depuis les années 1980 (comme le soutiennent PSZ) ou comme ayant évolué de manière bien plus modérée (comme le proposent AS). En dépit de leurs divergences, les deux équipes s’accordent sur un point : les inégalités n’ont pas diminué aux Etats-Unis. Pour être tout à fait prudent, on pourrait dire que PSZ donnent une estimation plus haute de l’évolution des inégalités, tandis que AS en donnent une estimation plus basse.
Dans tous les cas, comparer les contestations des choix des études de PSZ sur les inégalités à des contestations de l’existence d’un réchauffement climatique d’origine anthropique parait mal avisé. Les hypothèses auxiliaires qui permettent d’observer que le réchauffement climatique est sorti du bruit, et qu’il est d’origine anthropique sont unanimement partagées dans la communauté scientifique en climatologie. Ce n’est pas le cas en économie. Il existe toujours un débat scientifique entre économistes, c’est-à-dire qu’il se déroule non pas seulement dans la presse, mais aussi dans des revues scientifiques les plus prestigieuses de la discipline - notez d’ailleurs que The Economist est un titre de presse comme le Monde, pas une revue à comité de lecture comme le Journal of Political Economy où ont été publiés les analyses d’AS. Contrairement à ce qu’on peut penser, il existe en économie des points de consensus, en témoignent par exemple les sondages d’universitaires en économie, mais le débat ne semble pas être (encore ?) être tranché sur ce sujet.
Ainsi, traiter ceux qui contestent les conclusions de PSZ de marchands de doute comme le fait le journaliste Christian Chavagneux, un terme qui a été employé pour désigner des activistes climato-sceptiques, est parfaitement excessif. Symétriquement, affirmer que les travaux de PSZ ont été purement et simplement débunkés n’en est pas moins abusif. Ni Arnaud ni moi ne sommes experts de la mesure des inégalités de revenu, et le contact avec la littérature scientifique n’a fait que confirmer nos impressions sur la complexité du sujet. Nous n’avons d’ailleurs pas mentionné toutes les hypothèses qui font débat.
L’évolution des inégalités est un enjeu démocratique important, en témoigne par exemple le fait qu’une part croissante de citoyens des pays développés trouvent les inégalités trop hautes depuis les années 1980. Un sujet si central mérite mieux que certaines analyses incendiaires mais péremptoires.
Louis Fréget et Arnaud Pandevant (X: @PandevantArnaud)
Nous remercions Sylvain Catherine pour ses commentaires avisés !
Notes de bas de page
(1) Sans ces hypothèses, on peut observer une distribution des revenus après taxes, mais pas la vraie distribution des revenus avant taxes, et on ignore les effets d’équilibre général (changements des prix, salaires, taux d’intérêt…).
(2) Comme le disent PSZ dans leur article de 2018, “Some parts of national income never show up on any person’s bank account, but it is not a reason to ignore them.”
(3) Sur ce point, on considère généralement que l’offre de travail est moins élastique que la demande - même le dernier working paper de SZ fait ce choix. Schématiquement, ceci signifie que les employeurs peuvent plus facilement limiter la hausse des salaires que les employés ne peuvent réduire leurs heures de travail pour ‘échapper’ à la charge de la taxe. Dans cette perspective, la taxation du travail revient principalement sur les salariés.
(4) On peut aussi les désigner sous le nom de “loyer fictif”, mais ce nom garantit de déclencher une polémique !
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